Elle est là. Il est un peu tôt donc elle s'échauffe pendant que je suis là, à attendre le début du cours.
Il fait encore jour.
Ma mère m'a déposée car elle avait des courses à faire dans le coin. Elle va encore s'acheter des fringues, de toutes façons c'est la seule chose qu'elle sait faire en ce moment.
Et moi je suis assise, dans ce vestiaire, les pieds sur le banc, et je me fiche bien de ce que fais ma mère. j'écris sur ce cahier. Et je sais qu'elle est là.
Derrière la porte. Elle s'étire, elle s'entraîne un peu. Elle n'a pas encore enfilé sa tenue...
Elle m'a souri tout à l'heure quand je suis entrée.
C'est bizarre car il n'y a personne d'autre que nous deux.
Comme si justement, il fallait qu'on nous laisse seules. Qu'on nous force à nous rencontrer.
Ses affaires sont posées à l'autre bout du vestiaire, près de la douche. Là où on ne voit pas trop les autres filles. Est-elle pudique ? Timide ? Je m'approche de ses affaires et les contemple. Cela peut paraître bête, mais j'ai envie de tout savoir d'elle. Jusqu'aux moindres petits détails qui la concernent. J'ai envie de l'aimer. Je crois. Envie de la connaître.
Je crois que je vais m'entraîner un peu aussi.
J'espère qu'elle n'est pas comme les autres. Qu'elle ne pensera pas que je suis froide. Qu'elle ne pensera pas que je suis hautaine. Car ce n'est pas vrai. Elle m'intéresse.
Oh, pour une fois il faut que je fasse un effort, il faut que je lui parle.
Une petite voix en moi me dit :
"Allez Claire, fonce ! Qui ne tente rien n'a rien !".
Je vais l'écouter. Je vais ranger ce cahier dans mon sac bleu, et je vais aller à a rencontre.

Fin de l'entraînement.
Ce cours était génial. Nous n'étions que toutes les deux face au prof. Il est si gentil. Il a l'air de beaucoup l'apprécier. On dirait qu'ils se connaissent. je veux dire en dehors du club.
Elle est dans le niveau juste au dessus de moi.
Je me suis beaucoup appliquée... Je ne savais pas trop quoi faire. La laisser gagner ? Ou bien lui prouver que je sais être douée ?
Je me demandais comment on ferait après. Si elle serait vexée par ma victoire ou si elle me regarderait de haut si je perdais.
J'ai décidé de la jouer amicale, comme un jeu, vraiment un jeu. Je me suis donnée à fond à en oublier qui gagnait qui perdait.
Bon, derrière un masque, on peut s'imaginer n'importe quoi. Un sourire, ou bien un regard noir.
Mais la réponse est arrivée à la fin du cours, elle m'a sourit, franchement, fraîchement. On a discuté un peu.
Ce qui est bien c'est que je n'avais pas le regard des autres qui sont habitués à moi et à mon silence.
Là je pouvais dire ce que je voulais.
Je pouvais être moi.
Elle m'a dit qu'elle aimerait me revoir. Et m'a demandé si je revenais au cours du soir de demain. Je lui ai dit que oui, bien sûr, je serais là (j'imaginais déjà la réponse de maman...).
Elle a des yeux profonds, un sourire agréable, elle fait dynamique, accessible, elle ne prend pas de grands airs.
Quand elle est partie, je suis restée un peu avec mon prof.
Mais mes pensées restaient fixées sur elle.
Et puis j'ai dû rentrer à la maison.

Au fait...
Elle s'appelle Fanny.